Lancaster

(2018)

Je croyais qu'il me serait facile de revivre les souvenirs d'enfance de mon père, de mes les approprier.

Il aimait beaucoup et depuis toujours les longues ballades en auto. Nous sommes souvent allés ensemble à Lancaster, mais aussi à Saint-Blaise, Howick, Saint-Valentin, Sainte-Anne-de-Bellevue, villages de jeunesse de mon père. Mon grand-père étant cheminot, il a du reconstruire ses amitiés de nombreuses fois.

C'est de Lancaster que mon père garde ses premiers souvenirs. Il y vécu ses dernières années d'enfance et le début de son adolescence à une époque ou le village était à peine plus petit qu'aujourd'hui, une ou deux rues en moins. Les parties de hockey sur la rivière Raisin en hiver, les baignades dans le fleuve en sautant du toit des "boat houses" du quai de South-Lancaster, les parties de football sur le terrain vague à coté de la maison. Son apprentissage de l'anglais même s'il fréquentait l'école francophone du village.

Mais si le village n'a pas beaucoup grossi, il n'est plus le même. La route Montréal-Toronto qui traversait le village a été remplacé par une autoroute 300 mètres plus au sud, entre le village et le fleuve. Le train est omniprésent même si la gare a disparu. Il n'y a plus d'école. Les anciens du village qui fréquentaient l'école francophone y sont peut-être de retour depuis qu'elle est transformée en centre d'hébergement pour personnes âgées.

On entend le bruit des voitures, des trains qui passent, des chiens
qui aboient.

Mais on entend pas plus les enfants qu'on ne les voit.

Difficile dans ces moments-là d'imaginer que des enfants ont pu y être heureux.